Littérature étrangère

Luis Sepúlveda

Histoires d’ici et d’ailleurs

illustration

Chronique de Aurélie Janssens

Librairie Page et Plume (Limoges)

Dans la continuité des Roses d’Atacama, Luis Sepúlveda nous offre avec Histoires d’ici et d’ailleurs un recueil de chroniques qui décrivent avec ironie le monde tel 
qu’il est. Ironie, mais aussi tendresse 
et légèreté.

Pour parler de ce livre, on pourrait se contenter de dire que tout est dans le titre, tout son projet littéraire : raconter des histoires vues, lues, entendues à travers le monde. On pourrait aussi dire brièvement que c’est une somme d’articles traitant de sujets divers et variés. Ce serait négliger la part de « magie » si spécifique à Sepúlveda, ce conteur fantastique, écrivain engagé, ouvert sur le monde et son époque, artiste doté de la conscience très claire de ceux qui l’entourent. Tout commence par une photo prise en 1982 dans une banlieue ouvrière du Chili. Cette photo montre un groupe d’enfants souriants. En 1990, après la chute de la dictature, le photographe retourne dans ce pays qu’il a fui et décide de retrouver ces enfants. Malheureusement, c’est une dure réalité qui l’attend. L’un d’eux s’est fait tuer parce qu’il a volé un sac pour nourrir sa famille, les autres ne vont à l’école que parce que c’est là que leur est servi leur seul repas chaud de la journée, et Cécilia, 17 ans, porte un regard amer sur ses rêves d’enfant : « Avant je rêvais de vivre. Je rêvais de toutes les belles choses que je pourrais faire quand je serais grande. Maintenant je ne rêve plus. Maintenant, j’ai peur de rêver et, quand ça m’arrive, ça me met en colère, les rêves sont des mensonges. » Voilà dans quel état la dictature a laissé cette jeune génération amenée à prendre la relève. Cependant, tout n’est pas sombre dans ce livre. Sepúlveda rend aussi hommage aux grandes figures qui l’ont inspiré, à toutes ces belles rencontres qu’il a faites, aux artistes engagés, hommes et femmes de l’ombre qui ont œuvré pour « une vie juste, des lendemains moins insensés », à son éditrice française Anne-Marie Métailié, et même à un chien punk dont il fait un symbole de liberté ! Il se permet au passage de régler ses comptes avec certains chefs d’État, anciens dictateurs ou hommes politiques contemporains, toujours avec finesse et beaucoup d’esprit. Alors s’il ne devait exister qu’un mot pour qualifier ce livre, ce serait : la vie !

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