Littérature française

Stéphane Velut

Festival

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Chronique de Aurélie Janssens

Librairie Page et Plume (Limoges)

Ils sont « affreux, sales et méchants » et préparent le casse du siècle au festival de Cannes, seul moyen pour eux de s’arracher à cette « Airstream » paumée en bordure de pinède d’un camping désaffecté. Pour leur plus grand malheur et notre plus grand plaisir.

Johannes Meert est analphabète et orphelin, toute sa vie tient dans une valise. Après un détour par la case prison pour le viol d’une adolescente – oui, mais ce n’est pas sa faute : elle « sentait la brioche » –, où les codétenus lui ont fait passer l’envie de recommencer, et une parenthèse de douceur chez une petite vieille dont il devient l’auxiliaire de vie, il se retrouve en cavale. Sur sa route, il croise Flink, qui possède pour seule ressource le butin de ses vols et les recettes de ses parties de jeux au casino, les unes et les autres lui permettant, en outre, de profiter de séjours réguliers à l’ombre… d’une cellule. La mère de celui-ci, obèse et fan absolue de séries américaines, vit dans une caravane, tout confort malgré son étroitesse, au fond d’un camping entièrement vide, où elle a été oubliée après le démantèlement des lieux. Son rosier fétiche et la tombe de son défunt mari agrémentent son environnement, ainsi qu’un petit potager où sa bru aime à se promener nue, pendant que Flink la mate par la fenêtre. Hélène, la bru, a tout de la bimbo, voire de la cagole : popotin divin moulé dans un micro-short, poitrine saillante sous débardeur léger et une bouche à se damner. Flink n’aura pas à supporter longtemps les regards énamourés ou lubriques des mâles qui croisent son chemin, car elle décide, pour ressembler à ses idoles au cinéma, de se refaire les dents et se voit affublée d’un attirail métallique qui la défigure totalement. Le festival de Cannes commence. George, Nicole, Clint, tout le monde est là. Et cette équipe de bras cassés fomente un coup sans précédent. On ne sait si Stéphane Velut, dont c’est ici le deuxième roman, se plaît à rendre à la fois attachants et détestables ses personnages, mais il le fait, en tout cas, avec un talent incomparable.

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