Littérature française
Adèle Van Reeth
Inconsolable
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Adèle Van Reeth
Inconsolable
Gallimard
12/01/2023
200 pages, 18 €
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Chronique de
Linda Pommereul
Librairie Doucet (Le Mans) -
❤ Lu et conseillé par
5 libraire(s)
- Laurence Behocaray de I.U.T. Carrières sociales, Université (Tours)
- Jean-Pierre Agasse de Actes Sud (Arles)
- Linda Pommereul de Doucet (Le Mans)
- Lyonel Sasso de Dialogues (Morlaix)
- Achille Sofer de Le Pain des rêves (Saint-Brieuc)
✒ Linda Pommereul
(Librairie Doucet, Le Mans)
Écrit au fil des mois qui ont suivi la disparition de son père, Inconsolable est un récit qui éblouit autant par sa pureté littéraire que par sa force émotionnelle. Il est heureux de cheminer avec Adèle Van Reeth, de suivre la réflexion de cette femme fragilisée qui laisse deviner ses failles sous une plume élégante et sincère.
La consolation est selon Stig Dagerman « un besoin impossible à rassasier ». La mort est une séparation sans retour, le début des plus jamais. Fini les conversations et les rires. « Quand je dirai papa, qui me répondra ? » Après avoir veillé son père pendant sa maladie, l’auteure fait la connaissance de ce mal qui empoisonne l’existence de tous ceux qui l’approchent, le regardent épuiser, ronger le corps de celui qu’on aimait jusqu’à la victoire de la mort. Malgré les larmes et les accès de désespoir, elle sonde l’indicible de la douleur et du manque. Dans ce récit comme une mise à nu, elle interroge sa propre expérience. Comment renaître à soi quand un seul être vous manque ? Aucun geste, aucun mot ne pourra la détourner de sa peine. « Je sais que les mots ne pourront rien, qu’ils n’auront aucune action sur mon chagrin. » Car déposer des mots sur les événements ne suffit pas. D’ailleurs Adèle Van Reeth refuse l’injonction de cette consolation qu’elle envisage comme une trahison. Elle réclame le droit d’être en deuil, le droit d’être triste et même celui d’aller mal, peu importe les attentions de son entourage. Consoler ne permet pas la guérison. Elle interroge le manque. Que reste-t-il de quelqu’un sans l’amour de son père ? Perdre un être aimé, c’est se perdre du même coup. En écrivant la vie et la mort de son père, l’auteure prend conscience de sa propre finitude. Penser la consolation permet de comprendre la dimension intrinsèque de la perte. Comment faire place à la vie quand nous sommes en deuil ? Pourtant sa propre nécessité de vivre par l’enfant qu’elle porte fera écho à l’absence du père. Elle imagine l’avenir. Elle portera à tout jamais cette présence et transmettra l’amour de celui-ci à son enfant. Même si nous sommes confrontés à des séparations, la vie en échange nous donne de l’or, elle nous donne une vue de plus en plus ample et éblouie. Adèle Van Reeth bâtit pour son père un écrin de mots, bercé d’amour infini et permet, après cette brisure identitaire, de magnifiques retrouvailles de papier.