Littérature étrangère

Michael Finkel

Le Voleur d'art

✒ Stanislas Rigot

(Librairie Lamartine, Paris)

Avec ce récit autour de l’incroyable vie de Stéphane Breitwieser, peut-être le plus grand voleur d’art de tous les temps, Michael Finkel s’impose dans la très courue famille de la non-fiction.

Stéphane est un jeune homme d'une vingtaine d'années qui vit chez sa mère, au début des années 1990, dans la banlieue de Mulhouse, en compagnie d’Anne-Catherine, pour qui il a eu un véritable coup de foudre. Le couple, au-delà de cet amour fusionnel, partage une passion commune pour l'art, une passion qui va littéralement se matérialiser lorsqu'ils vont commencer à voler diverses œuvres dans des petits musées, profitant de l'absence de surveillance ou de systèmes de sécurité. Rapidement, ils constituent une incroyable collection. Mais Stéphane ne se considère pas comme un voleur d’art au sens strict et ce pour au moins trois raisons : d’abord, il ne vole que ce qui l’émeut, quelle que soit la valeur des différents objets ; ensuite, il n’utilise jamais la violence ; enfin, il ne revend jamais ce qu’il vole. La première conséquence de cette « éthique » est que sa chambre devient un véritable musée. (À l’exception d’Anne Catherine, personne n’a accès à l’étage qu’il occupe dans la maison et un de ses grands plaisirs est de se réveiller au milieu de ces chefs-d’œuvre.) La seconde est que le couple est toujours à tirer le diable par la queue : Stéphane ne travaille pas et Anne-Catherine ne dispose que d’un salaire d’aide-soignante. Ce qui n’empêchera pas le couple de sévir pendant des années et de perfectionner son modus operandi. Jusqu’à ce que le destin finisse forcément par les rattraper. Michael Finkel, journaliste américain, auteur au parcours aussi rocambolesque que les personnages qui le fascinent, nous raconte avec une rare efficacité ce qui pourrait apparaître de prime abord comme la belle histoire d’un charmant cambrioleur, victime d’un syndrome de Stendhal à répétition, mais dont la véritable personnalité se révèle dans la seconde partie, vertigineuse descente aux enfers et nouvelle preuve saisissante d’une réalité dépassant toujours la plus folle des fictions.

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