Essais

François Ravard

Rappels

✒ Stanislas Rigot

(Librairie Lamartine, Paris)

Derrière chaque grand groupe se cache un grand manager. Du colonel Parker à Peter Grant, ils ont façonné les légendes. Rappels est l'autobiographie de l'homme derrière Téléphone. Montez le son. Potard sur le 11.

À un journaliste qui lui demandait ce qu'il pensait du rock français, John Lennon aurait répondu : «°Est-ce que je vous parle du vin anglais ?°». Cette citation, certainement apocryphe, exposait pourtant l'état critique d'une scène musicale française pour le moins à la traîne en matière de rock. Mais au tournant des années 1970, une bande de gamins hirsutes qui s'étaient baptisés Téléphone prirent d'assaut la forteresse de la variétoche giscardienne. L'histoire est connue. Ce qui l'est moins, c'est le rôle tenu par le cinquième membre du groupe, François Ravard, le copain devenu manager, l'indispensable personnage de l'ombre, l'ange gardien, le roi du lancement d'album et du montage de tournée, qui essaiera à sa manière d'inventer ce métier inconnu à l'époque dans l'hexagone. Il nous offre aujourd'hui ses mémoires écrites à l'anglo-saxonne, pied au plancher et à l'os, avec l'aide de son complice Philippe Manœuvre, jamais bien loin lorsqu'il s'agit de nous raconter des histoires d'ampli qui fument. Bien sûr, la colonne vertébrale du récit est l'histoire de Téléphone jusqu'au triomphal autant qu'improbable come-back sous le nom des Insus. Ce récit ébouriffe avec ses nombreuses anecdotes d'un monde quasiment disparu aujourd'hui : un détour rocambolesque par le monde du cinéma aux côtés notamment de Jean-Pierre Mocky, la brève mais intense virée aux côtés des Rita Mitsouko, son amitié avec Serge Gainsbourg, sa rencontre avec Marianne Faithfull et leur histoire d'amour qui le propulsera au milieu de l'aristocratie rock (bonjour les Stones, bonsoir Lou Reed, bonjour Nick Cave, bonsoir Metallica…), la maladie qui le frappera durement ou bien la naissance de son fils. Le résultat est électrique, forcément électrique.

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