Littérature étrangère

Faire-part

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Par Stanislas Rigot

Librairie Lamartine (Paris)

1942, Jack Kerouac, 20 ans, fort de son expérience de marin, écrit ce premier livre qu’il ne publiera jamais. Pourtant, bien loin de l’anecdotique, c’est bien au cœur de ces pages que naît sa légende.

Si l’on reprend la bibliographie de Jack Kerouac qui s’avère toujours un rien complexe à décortiquer tant les écarts entre l’écriture et la parution furent parfois vertigineux, son premier roman s’appelle The town and the city et il a été publié en 1950. Mais en 2011 est paru aux États-Unis un roman inédit jusque là, L’océan est mon frère, daté de 1942 et aujourd’hui traduit (et de quelle manière !) par Pierre Guglielmina à l’occasion du centenaire de la naissance de l’auteur. Et si la crainte après tant d’années de ne découvrir qu’un vieux fond de tiroir poussiéreux pour aficionados au dernier stade de la dépendance est bien présente, il suffit de quelques pages pour balayer cette angoisse légitime. En effet, comment ne pas trouver, chapitre après chapitre, dans cette errance de deux hommes qui s’apprêtent à embarquer à bord du Westminster, les premiers échos de ce qui allait devenir le style et les thématiques du chef de file de la Beat Generation. Et si l’incendie n’est pas encore à l’œuvre, les braises sont déjà bien vivaces. Ce roman nous raconte la rencontre de deux hommes que tout semble opposer, d’un côté le marin taiseux, Wesley, et de l’autre le professeur de littérature à l’université s’ennuyant et prêt à se jeter dans l’Aventure, le dénommé Bill. Ils vont former un duo pour le moins étonnamment assorti, reflet chacun à leur manière des questionnements incessants de leur auteur. Au programme : amitié masculine, beuveries, hommages vibrants à la littérature, routes américaines, fulgurances poétiques ici et là… Un roman réjouissant porté par l’envie et la soif de vivre et l’émotion procurée par la naissance d’un des plus grands écrivains américains du XXe siècle. Pour accompagner cette parution, de nombreux titres font ou refont surface. À noter chez Gallimard Poésie le Mexico City Blues, à « L’Imaginaire » Le Livre des rêves, en bilingue chez Folio Sur les origines d’une génération et Satori à Paris, la surprise venant du côté de Jean-François Duval avec Luanne sur la route, avec Neal Cassady et Jack Kerouac (Gallimard) où l’auteur met en scène celle qui allait devenir l’héroïne du chef-d’œuvre de Kerouac, offrant un nouvel angle de lecture à cette épopée de légende.