Littérature française

Cloé Korman

Les Saisons de Louveplaine

✒ Sarah Gastel

(Librairie Adrienne, Lyon)

Après le remarqué Les Hommes-couleurs (Seuil, 2010) couronné par le prix du Livre Inter, Cloé Korman publie un deuxième roman dense et brillant dont le personnage principal est Louveplaine, ville imaginaire située dans le 93.

Nour et Hassan sont mariés. Trois ans qu’Hassan, parti travailler en France, rend visite à Nour, restée en Algérie, à chaque vacances d’été. Trois ans qu’il lui promet des retrouvailles prochaines, le temps qu’il prépare le nécessaire pour leur installation. Après lui avoir rendu une nouvelle visite, Hassan ne donne brusquement plus signe de vie. La jeune femme débarque alors précipitamment dans la ville de Louveplaine. Au silence du téléphone portable fait écho le vide de l’appartement dont elle a les clefs : ni meubles, ni électricité, ni le moindre signe d’existence de son époux. Hassan a disparu ! Désemparée, Nour part en quête d’informations auprès des voisins. Elle fait progressivement connaissance avec les habitants de la cité principalement issus de l’immigration et tous porteurs d’espérances, de secrets et de craintes. Il y a Soufia, mère célibataire infirmière, M. Boudjedra et son inséparable chienne Sayo qui s’occupe du recensement des habitants, la famille Bokassa, etc. Nour trouve en Sonny, jeune lycéen, un informateur susceptible de la mener à son mari dont les activités illicites commencent doucement à lui apparaître. Dans Les Saisons de Louveplaine, roman situé au cœur d’une cité de Seine-Saint-Denis, le HLM Triolet et sa sœur jumelle la tour Aragon, en cours de démantèlement, sont le terreau d’histoires qui se révèlent au fil des pages, au détour d’une rue, d’un parking, d’un jardin ou d’une forêt. C’est là la grande force de ce roman foisonnant aux multiples personnages. Grâce à son extraordinaire talent d’évocation, son sens de la comparaison inattendue mais qui fait mouche et son réalisme brut et poétique, Cloé Korman sonde avec justesse les entrailles d’une ville où la vie s’organise pour ceux qui sont arrivés au bout de leur traversée. Loin des études sociologiques et des lieux communs véhiculés par les médias, Louveplaine bat et vit au rythme de ses habitants venus d’ailleurs.

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