Menu
S'abonner Nous contacter Se connecter
logo Page des libraire

Littérature française

Guillaume Collet

Les Mains pleines

✒ Sarah Gastel

(Librairie Adrienne, Lyon)

Après Les Yeux de travers (Les Avrils, 2022), Guillaume Collet livre un texte original, traversé par une ironie mêlée de tendresse, autour du grand âge, sur le point de devenir un âge normal de l’existence.

Petit-Fils, bientôt 30 ans, cascadeur aux contrats précaires, est petit-fils de riches. Ses grands-parents vivent confortablement dans une grande maison bourgeoise à la campagne saturée d’armes exotiques. Ils ont visité les quatre coins du monde et n’ont jamais demandé d’aide à personne. Mais un jour, le quotidien commence à se détraquer et quand Petit-Fils débarque, les voisins le préviennent qu’il ne sera pas le bienvenu. Et tout va de travers ! Il découvre deux personnes âgées, tournant en rond dans leur démence. Tandis que Grand-Père se consume dans un mutisme forcené, dans un lieu inatteignable, tel « un vieil automate », Grand-Mère, montée sur ressort et invariablement méfiante, établit de longues listes, perd une multitude d’objets et mélange hier, avant-hier et demain. Pour ces deux-là qui ne s’encombrent pas de paroles, des « nuisibles » s’introduisent dans leur domicile pour chahuter leur routine ordinaire. Face à cette « perte de contrôle généralisée du quotidien », Petit-Fils va visiter régulièrement ses grands-parents, tenter des choses inattendues pour gagner leur confiance et les aider. Dans ce court texte incisif, à l’écriture distanciée, Guillaume Collet ne dédaigne pas l’ironie pour brosser un portrait de famille décalé, où deux générations se confrontent. Pièce par pièce, il géométrise le thème de la dépendance et de la sénilité, dans un huis clos détraqué et comique. Il décrypte de fait la complexité des liens familiaux (qu’est-ce que le devoir familial, que faire de cette obligation ?) tout en incorporant la problématique des inégalités sociales au sein d’une même famille, ainsi qu’une réflexion sur ce que vivent les nouvelles générations par rapport aux précédentes. Un texte féroce, heurté, troublant, imprégné toutefois d’une douceur certaine.

Les autres chroniques du libraire