Bande dessinée

Fromental , Bocquet

Simenon, L'Ostrogoth

illustration

Chronique de Juliet Romeo

Librairie La Madeleine (Lyon)

Partons à la découverte de la première vie de Georges Simenon, celle d’avant Maigret, dans cette étonnante bande dessinée écrite à huit mains, alors que plusieurs adaptations des romans de Simenon sortent également en librairie en cette année 2023.

 

Dans cette biographie qui paraît dans son intégralité en couleur, après une parution en trois cahiers noir et blanc, John Simenon, José-Louis Bocquet, Jean-Luc Fromental et Loustal nous invitent à suivre les traces de Georges Simenon, de sa campagne natale aux premiers succès parisiens du commissaire Maigret.

2023 est l’année anniversaire des 120 ans de la naissance de Georges Simenon. À cette occasion, les éditions Dargaud entament un travail de fond pour rendre hommage au père du Commissaire Maigret. En parallèle d’une collection d’adaptations des romans dits « durs » de Simenon (ceux qui ne mettent pas Maigret en scène) qui changeront d’auteur et de dessinateur à chaque album, paraît en cette rentrée un biopic consacré au Georges Simenon d’avant Maigret, Simenon, L’Ostrogoth. Si L’Ostrogoth est le nom du bateau que l’auteur fit construire dans le port de Fécamp, l’occurrence renvoie également à cette définition : « personnage extravagant ». Soit tout à fait ce que le quatuor d’auteurs de cette biographie (composé de trois scénaristes : Simenon, Bocquet et Fromental – Loustal étant au dessin) nous montre de Simenon et de sa première épouse, Régine Renchon dite Tigy. De la belle ville de Liège où ils vont se marier pour pouvoir quitter leurs familles et s’émanciper, à Paris où ils vont connaître le succès, le couple libre et sulfureux va vivre à 100 à l’heure. Tigy et sa peinture, Simenon et son écriture. Deux artistes qui s’aimaient, s’aidaient, se soutenaient pour permettre à l’un et à l’autre de tirer le meilleur de soi. Ils vont traverser ensemble des crises existentielles, des crises artistiques, des coups de cœur, souvent physiques et amoureux, et faire des rencontres déterminantes, avec l’étonnante Joséphine Baker, par exemple, ou avec Colette qui mettra Simenon sur les rails de l’écriture. Et dans le cœur de cette relation avec Tigy, Simenon parviendra à déployer tout son talent jusqu’à devenir un acharné de l’écriture, à la discipline stricte lui permettant une production très impressionnante. Tigy continuera de mener la vie qu’elle souhaitait, artiste d’abord, puis mécanicienne sur L’Ostrogoth pour leur permettre de poursuivre leur compagnonnage. Simenon, L’Ostrogoth est un magnifique hommage à une période de la vie de l’auteur que l’on ne connaît pas ou peu, mais également à une époque où tout est possible, où l’on peut vivre avec rien un jour puis connaître l’opulence le lendemain à la faveur d’une rencontre. C’est à travers ce vent de folie qui souffle sur Paris, caractérisé par exemple par l’épisode du projet d’écriture dans une cage de verre, que l’on voit se dessiner petit à petit le Simenon que l’on connaît, pipe à la bouche, casquette sur la tête.

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