Littérature française

Alexis Ragougneau

Niels

✒ Marie-Laure Turoche

( , )

Alexis Ragougneau délaisse le polar pour le roman historique. On y retrouve son goût pour les intrigues et bien sûr sa passion pour le théâtre. En effet, l’auteur joue avec les codes dramaturgiques pour mieux tromper son lecteur.

Deuxième sélection du Prix Goncourt 2017

 

1940. Niels Rasmussen vit au Danemark avec Sarah, jolie juive à la chevelure rousse pour laquelle il s’est engagé dans la Résistance en tant qu’artificier. Lorsque sonne enfin la fin de la guerre, Niels reçoit un mystérieux courrier. C’est un extrait d’un article du Parisien libéré : « Épuration : c’est définitivement le 7 mai que le dramaturge Jean-François Canonnier actuellement détenu à Fresnes, passera devant la Cour de justice de la Seine ». Niels ne veut pas croire que son ami, avec qui il a monté plusieurs pièces de théâtre lorsqu’il vivait à Paris, soit réellement un collaborateur. Il décide de partir immédiatement pour la capitale française. Ce qu’il va découvrir là-bas est comme une immense représentation. Le rideau est tombé, les masques aussi et ce qui se cache derrière n’est pas très glorieux. Certains tentent encore de jouer le rôle de gentil ou de héros, d’autres assument le fait d’avoir fraternisé avec l’ennemi. Alexis Ragougneau pose cette question gênante : comment aurions-nous agi pendant l’Occupation ? L’auteur revient aussi sur beaucoup d’artistes et écrivains à la moralité douteuse tels que Rebatet, Brasillach et Céline bien sûr. Dans cette comédie de faux-semblants, comment démêler le vrai du faux ? Connaît-on vraiment les gens ? Niels connaissait-il réellement son ami ? À la fois enquête policière, roman historique et théâtre presque « burlesque » (au regard de certains personnages), Niels est un roman aux multiples facettes, en trompe-l’œil pourrait-on dire. Le lecteur comme le narrateur doit apprendre à déchiffrer les codes et découvrir qui est acteur ou pas. Alors oui, encore un roman qui se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale, mais Niels fait preuve malgré tout d’une très grande originalité, aussi bien pour son style que pour sa trame narrative.

Les autres chroniques du libraire