Littérature étrangère

Jennifer Egan

Manhattan Beach

✒ Guillaume Chevalier

(Librairie Mot à mot, Fontenay-sous-Bois)

Anna Kerrigan, fille d’immigrés irlandais, cherche sa place et enquête sur la disparition de son père, à New York, en pleine Seconde Guerre mondiale. Un roman envoûtant tout en clair-obscur.

New York, 1934 : Anna Kerrigan, 11 ans et fille d’immigrés irlandais, accompagne son père Eddie chez Dexter Styles, à la personnalité insaisissable. Le lien qui unit les deux hommes lui échappe et cette visite n’aura pas de suite. Une dizaine d’années plus tard, le père d’Anna a disparu sans laisser de traces et la Seconde Guerre mondiale a débuté. Anna travaille comme de nombreuses femmes au chantier naval de Brooklyn en remplacement des hommes partis au front. Elle rêve de devenir la première femme scaphandrier mais fait face à l’hostilité d’un monde réservé aux hommes. En parallèle, l’une de ses amies l’entraîne un soir dans un night-club dont le patron n’est autre que Dexter Styles. Sous un vernis de légalité, il apparaît très rapidement que l’homme d’affaires est membre de la pègre. Des mois durant, les chemins d’Anna et de Dexter vont se croiser, ce qui permettra peut-être à cette dernière de comprendre les raisons de la disparition de son père. Jennifer Egan nous livre un roman historique fascinant, alternant les temporalités et les points de vue (Anna, Dexter, Eddie), et qui retrace, à travers les destins des protagonistes, l’Histoire des États-Unis, de la Grande Dépression à la place des femmes durant la Seconde Guerre mondiale, de la communauté irlandaise aux empires du grand banditisme construits durant la prohibition. Manhattan Beach, bien que traditionnel dans sa forme, n’en reste pas moins un roman riche de sens. Dans cette histoire de destins entrelacés, tous les personnages ont des secrets qui affectent leur vie familiale. Si un secret est d’abord une information que l’on cache, il arrive que cette dissimulation devienne intenable au point de contraindre son porteur à des choix non désirés. L’auteure s’en amuse et tisse une intrigue accrocheuse et érudite qui vous habitera longtemps après avoir refermé le livre.

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