Entretien avec le diable

Le chevalier de Volnay, chargé par le roi Louis XV d’enquêter sur les morts étranges, fait route vers Paris accompagné par son père, un moine ayant depuis longtemps renoncé à la foi. Frappé de cécité temporaire, il est contraint de demander de l’aide dans une vallée reculée de Savoie. Dès lors, les mystères s’accumulent : une abbaye hantée, une jeune fille possédée, des meurtres qui se succèdent… Dans une ambiance surnaturelle qui tranche avec les autres volumes de la série, l’auteur continue d’approfondir des personnages attachants et complexes. Leur précédente enquête à Venise les a profondément affectés, et laisse les personnages en proie au doute et à la mélancolie. En outre, l’aveuglement de Volnay le fragilise et inverse quelque peu la dynamique habituelle du duo d’enquêteurs, puisque son père se voit confier un rôle prépondérant. Son statut de moine lui confère également une autorité certaine dans cette société accablée par le poids du religieux. Et c’est bien là que se trouve toute la richesse de ce roman. Derrière l’enquête et ses rebondissements s’esquisse le portrait d’une France encore soumise à l’Église catholique et à la royauté. Représentant la philosophie des lumières, Volnay et son père tenteront de trouver des explications rationnelles et scientifiques là où tous ne voient que des manifestations démoniaques. À travers son traitement des personnages féminins et de leurs rapports aux hommes, ce roman apporte également un éclairage âpre sur la condition des femmes au xviiie siècle et sur leur volonté de s’émanciper. Précisons que ce cinquième volet des enquêtes du commissaire aux morts étranges peut être lu indépendamment du reste de la série. Et nul doute qu’il incitera ses nouveaux lecteurs à découvrir l’ensemble de cette saga à l’ambiance si particulière.