Littérature étrangère
Joseph O’Connor
Le Bal des ombres
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Joseph O’Connor
Le Bal des ombres
Traduit de l’anglais (Irlande) par Carine Chichereau
Rivages
08/01/2020
462 pages, 23 €
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Chronique de
Marie Hirigoyen
Librairie Hirigoyen (Bayonne) -
❤ Lu et conseillé par
7 libraire(s)
- Valérie Faucon de BPI - Bibliothèque publique d’Information (Paris)
- Aurélie Janssens de Page et Plume (Limoges)
- Sarah Gastel de Adrienne (Lyon)
- Marianne Kmiecik
- Lucile Frassy de La Suite (Versailles)
- Sarah Mossman de Le Bel Aujourd'hui (Tréguier)
- Coline Thuillier de Mots en marge (La Garenne-Colombes)
✒ Marie Hirigoyen
(Librairie Hirigoyen, Bayonne)
Le très irlandais Joseph O’Connor nous happe pour une plongée étourdissante dans le Londres victorien où il décrypte la genèse d’un chef-d’œuvre de la littérature. Gothique et ténébreux en diable !
À Dublin, le jeune Bram Stoker, futur auteur de Dracula, est, à ses heures, critique de théâtre. Henry Irving, le grand comédien shakespearien le remarque et le nomme gestionnaire du Lyceum, théâtre londonien auquel il veut rendre son lustre. Une fois engagée Ellen Terry, l’actrice la plus célèbre de son temps, un triangle asymétrique amical et passionnel se soude pour des décennies où vont se multiplier représentations et tournées à travers le royaume et les États-Unis. Trois destins liés à celui d’un microcosme, ruche vibrionnante où se télescopent dans la plus grande agitation acteurs, costumiers, accessoiristes, sans oublier les rats et les fantômes, au cœur d’une ville hantée par l’ombre de Jack l’éventreur. La double personnalité de Bram Stoker étonne : ami d’Oscar Wilde, figure trouble et flamboyante, l’administrateur rigoureux est attiré par les lieux interlopes et traîne dans les rues la nuit dans une quête inavouée ou inavouable à l’époque. C’est à l’insu de tous, dans un grenier du théâtre, peuplé de revenants qu’il donne vie à sa créature, le comte Dracula, sans doute inspiré par le caractère exacerbé et vampirisant d’Irving. Son roman passe complètement inaperçu de son vivant avant de devenir le mythe que l’on sait, dans la lignée de la littérature anglaise fantastique, aux côtés de Mary Shelley et de Stevenson, comme l’expression de l’envers occulte d’une société en marche vers le progrès industriel et technologique. Joseph O’Connor, l’immense auteur de Redemption Falls et de Muse (Phébus), joue avec délectation sur le thème du double et élabore une architecture narrative où la fiction peut se déployer sous toutes ses formes : lettres, journaux, rêves, descriptions virtuoses, dialogues sur le vif, émaillés de traits d’humour noir soulignant la cruauté cynique du regard anglais sur les Irlandais. Et c’est en bon Irlandais raconteur d’histoires, qu’il convoque le surnaturel et gomme la frontière entre les mondes, visible et invisible, tandis qu’il sème au fil du récit des indices tirés de Dracula. Magistral.