Beaux livres

Georges Didi-Huberman

Peuples exposés, peuples figurants

CB

✒ Charlène Busalli

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Dans ce quatrième tome d’une série dédiée à l’histoire des images, Georges Didi-Huberman retrace l’histoire de la représentation des peuples. Entre peinture, photographie et cinéma, il en fait ressortir toute la poésie.

C’est de la représentation, non pas du peuple, mais bien des peuples, cette multiplicité de singularités, dont nous entretient Georges Didi-Huberman dans son dernier ouvrage. L’historien de l’art y partage tout d’abord son inquiétude sur la façon dont les peuples sont représentés à l’heure actuelle. Car si les peuples sont évidemment « exposés » à l’âge des médias, ils sont le plus souvent, soit « surexposés » tandis qu’on les donne en spectacle, soit « sous-exposés » cependant qu’on les censure. En effet, pour l’auteur, l’image est éminemment politique et elle doit permettre à celui qui est représenté d’exprimer sa singularité véritable. Durant des siècles, seuls les puissants étaient représentés individuellement. Ainsi, les visages des empereurs romains couvraient les pièces de monnaie, tandis que les souverains qui leur succédèrent se firent systématiquement tirer le portrait. Les rares fois où les peuples sont représentés à partir du Moyen Âge, c’est généralement pour être « exposé[s] en vue d’être exclu[s] ». Alors même que les représentations des peuples se sont multipliées à partir de l’âge moderne, leur exposition a rarement été animée par un dessein émancipateur. Au contraire : même involontairement, cette visibilité s’est souvent traduite par un surcroît d’aliénation. Georges Didi-Huberman dresse l’inventaire de ces différentes représentations, offrant une étude des œuvres de plusieurs artistes qui se sont efforcés de montrer les peuples de manière « vraie ». De Rembrandt à Goya, de Philippe Bazin à Eisenstein en passant par Pasolini, celui-ci dresse avec précision un tableau des œuvres qui parviennent, au moins en partie, à « faire de l’image un lieu du commun ». Toute la force de cet ouvrage vient de ce qu’il mêle explications techniques et réflexion politique à des interprétations poétiques des images illustrant le propos. Il devient alors difficile de ne pas partager l’enthousiasme que suscitent ces artistes capables de rendre sa dignité à l’homme.

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