Essais
Umberto Eco
Construire l’ennemi
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Umberto Eco
Construire l’ennemi
Traduit de l’italien par Miryem Bouzaher
Grasset
12/03/2014
304 pages, 19 €
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Chronique de
Christine Lechapt
Librairie Maison du livre (Rodez) -
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- Christine Lechapt de Maison du livre (Rodez)
✒ Christine Lechapt
(Librairie Maison du livre, Rodez)
En attendant son prochain roman, Umberto Eco nous invite à de petites « causeries » sur la sociologie, la littérature, l’éthique ou encore les sciences : une confirmation de son érudition, mais également de son humour.
Cet ouvrage aurait dû s’appeler Écrits occasionnels, mais devant l’austérité de ce titre qui aurait pu faire fuir le plus grand amateur d’Umberto Eco, le choix s’est porté sur l’intitulé de sa première « causerie ». Il n’en demeure pas moins que se trouvent ici réunies quelques interventions de l’auteur de ces dernières années dans des domaines divers et variés, et dont l’apport est essentiel à la compréhension de notre temps. Ainsi, en premier lieu, Umberto Eco revient sur la figure de l’ennemi, qu’il soit intérieur ou extérieur, les différentes formes qu’il a pris au cours des siècles et sa nécessité dans la cohésion d’un État ou d’une nation. Cette brillante argumentation illustre, si besoin était, que la paix dans nos sociétés est une belle utopie. Mais au-delà de cette question, tout comme celles relatives à l’éthique ou à l’affaire Wikileaks, on ne peut que se délecter de l’humour de l’auteur. À ce titre, son analyse de la poétique de l’excès chez Victor Hugo est un véritable bonheur. Loin d’écorner l’icône de la littérature française, cela nous donne encore davantage envie de relire son œuvre en étant plus attentif à la construction des intrigues, sans toutefois avoir de scrupules à sauter quelques passages qui nous paraîtraient ennuyeux. Et que penser du roman-feuilleton ? Umberto Eco lui rend ses lettres de noblesse en nous révélant pourquoi cette littérature n’est pas à négliger et quels sont les ressorts utilisés par les grands feuilletonistes comme Eugène Sue. Il n’est en revanche pas particulièrement tendre avec James Joyce (ni avec les astrologues d’ailleurs). Nul doute en refermant ce livre que vous aurez appris beaucoup de choses. Jubilatoire !