Essais

Laurence Devillairs

Petite philosophie de la mer

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Chronique de Marguerite Martin

Librairie Terre des livres (Lyon)

Leçons sans injonctions, cet essai est une pure réjouissance. En mer, le chemin vers un art de vivre respectueux de soi et du vivant se dessine. Tout lecteur y trouvera de quoi illuminer, poétiser et apaiser son monde intérieur.

Assujetti aux cycles de la nature, animal qu’il ignore être, l’humain ressent le besoin d’une douce mutation à l’approche de la pause estivale. Regarder la vie sous un angle plus large. Fuir la ville, savourer la solitude… le besoin de reconnexion avec un « soi » tenu éloigné par la course du quotidien surgit avec nos congés. Et si dresser le bilan de l’année écoulée n’est pas un besoin impérieux, ce temps hors du temps contraint guide les esprits vers ces hauteurs qui permettent d’envisager une autre manière d’être au monde. Mieux avec soi-même, la nature, les autres, en adéquation avec ses aspirations profondes, il est rare d’échapper à la quête de sérénité à laquelle ces espaces vacants nous convient. C’est l’appel du grand large auquel Laurence Devillairs répond, mêlant passion pour la mer et philosophie tangible. Où puiser la matière qui poétise nos ordinaires ? Comment trouver cet air qui manque lorsque la cohorte des obligations oppresse les élans et réduit les loisirs ? (Re)découvrir ébahi que la mer est une source mouvante et inépuisable de possibles : elle n’a pas à apparaitre pour prodiguer ses vertus, elle est, dans ses multiples facettes, à la disposition des imaginaires et fait plus qu’euphoriser et griser. Sans cesse changeante, elle brise et déjoue les immobilités. Imprévisible, elle démontre qu’accueillir l’inattendu paisiblement est toujours possible. Au fil de la lecture, les insoupçonnables nuances intimes qui sommeillent à l’esprit, telles ses teintes vert clair, percent à la conscience comme ses bleus outremer. Les milliers d’îles résistantes, odes au non-conformisme, incitent à devenir îlots volcaniques, à cultiver les feux sacrés. Les dragons de mer incitent alors la peur à se muer en courage d’affronter l’inédit, l’aventure. Être pirate, bafouer les (mauvaises) lois, corsaire si nécessaire : fuir les lâchetés ordinaires, arraisonner l’indécence est à portée de cœur. La mer, multiple, a la faculté rare d’emmener loin dans ces espaces vacants où l’esprit se plait à errer. Que content le chant des sirènes et le phare rassurant balayé par l’écume ? Que raconte le langage maritime : « Alpha, Bravo, Charlie, Tango » ? Lecteur moussaillon, grand navigateur, simple matelot : que vous craigniez requins et banquises ou rêviez d’être Robinson, qu’en Capitaine Achab vous poursuiviez sans relâche Moby Dick, vous aurez la surprise, en parcourant ces leçons, de trouver d’enchanteresses clés vers une forme de sagesse… que vous ignoriez chercher.