Littérature étrangère

Nazanine Hozar

Aria

illustration

Chronique de Gaëlle Maindron

Librairie Livres in room (Saint-Pol-de-Léon)

Une enfant peut-elle incarner les changements profonds qui marqueront à jamais l’histoire d’un pays ? Aria, petite fille de Téhéran, nous guide dans une société qui peine à se reconnaître alors que s’annonce la révolution islamique.

 

Tout commence pendant l’hiver 1953. Behrouz traverse la ville pour rejoindre sa femme à la faveur d’une permission lorsqu’il entend comme des cris de chats sous un mûrier assailli par des chiens errants. C’est alors que son bâton rencontre un bébé laissé là aux assauts de la nuit. Un bébé de quelques jours, aux yeux bleus, une fille qu’il appellera Aria. Commence alors le récit des trente premières années de la vie d’Aria à travers les femmes qui ont traversé son existence. Il y a d’abord Zhara, la femme de Behrouz, qui va la rejeter et la maltraiter mais aussi aiguiser cette force de caractère rare qui va lui permettre d’avancer quoi qu’il advienne. Malade, presque aveugle, elle est ensuite confiée à Fereshteh, riche veuve des quartiers Nord de Téhéran. Fereshteh n’a plus d’amour à donner mais elle va lui offrir l’accès à l’éducation et donc un avenir. Une fois Aria convertie à l’islam, elle va la pousser à faire acte de charité et se rendre dans les quartiers Sud pour apprendre à lire à deux jeunes filles. C’est alors qu’elle rencontre Mehri, une femme discrète et mystérieuse porteuse d’un grand secret. Aria grandit, elle devient étudiante, tombe amoureuse d’Hamlet et va à son tour devenir mère, mais tout change autour d’elle et chaque jour se resserre l’étau de la révolution. Quatre femmes comme quatre visages de l’Iran, quatre visages d’une société complexe où le religieux et le politique laissent de profondes traces. La révolution islamique est en marche, Aria va nous guider dans ses méandres. Lire Aria, c’est rencontrer un pays qui s’est perdu. C’est entreprendre un voyage qui nous dépasse dans une société en profonde mutation dont les habitants eux-mêmes ne comprennent plus les codes. C’est aussi découvrir le visage des femmes de Téhéran, fortes, déterminées mais forcées à rentrer dans le rang par des hommes tout aussi déterminés.