Littérature française

Romain Gary

Romans et récits I et II

SG

✒ Sandra Girault

(Librairie Privat, Toulouse)

Romain Gary crée l’événement ce printemps ! Le dernier monstre de la littérature française fait son entrée dans la prestigieuse Bibliothèque de La Pléiade ! Quinze romans et récits en deux volumes que complète l’album Pléiade 2019. Louons maintenant ce grand homme !

Il aura fallu attendre presque quarante ans, depuis ce jour tragique de décembre 1980 où Romain Gary choisit de se donner la mort, pour que les éditions Gallimard fassent entrer l’auteur de La Vie devant soi dans ce Panthéon des écrivains qu’est la Bibliothèque de La Pléiade. Ce formidable raconteur d’histoires, inventeur de personnages, fait aujourd’hui l’objet d’une édition en deux volumes réunissant une quinzaine de romans et récits, supervisée par Mireille Sacotte, professeure à la Sorbonne et spécialiste de l’auteur.Roman Kacew, né en 1914 à Vilnius, arrive en France à l’âge de 14 ans. Après des études de droit, il s’engage dans l’aviation et rejoint De Gaulle en 1940. À la fin de la guerre, il prend alors le nom de Romain Gary et publie son premier roman, Éducation européenne, avant d’entrer la même année au Quai d’Orsay et d’entamer une carrière diplomatique. De cette expérience, il tire une grande sensibilité au tragique de l’Histoire comme au malheur des hommes, créant des personnages souvent révoltés contre les comportements qui déshonorent la dignité humaine. Sa prose lui autorise des libertés dans ses prises de position que son humour, qui déconcerte autant qu’il séduit, accentue en conjurant toute tentation d’idéalisme dans sa littérature. Romain Gary porte une attention lucide aux enjeux de son époque qui se retrouvent dans ses textes : l’Afrique post-coloniale dans Les Racines du ciel (Prix Goncourt 1956), le refus de la guerre dans Adieu Gary Cooper ou les réseaux de la Résistance dans son ultime et plus beau roman, Les Cerfs-volants. Le thème du double ou de la dualité marque une grande partie de son œuvre : dans Clair de femme, où le mari continue d’aimer l’épouse malade après sa mort à travers une autre, dans Lady L. où les aristocrates sont aussi anarchistes, dans La Promesse de l’aube et Chien blanc où l’auteur s’attribue un double romanesque. Cette notion de double est poussée à son paroxysme par l’auteur lorsqu’il prend l’identité d’Émile Ajar, plus belle mystification de la littérature à ce jour (qu’il révèle dans son texte posthume Vie et mort d’Émile Ajar) lui permettant d’obtenir une seconde fois le prix Goncourt, pour son roman La Vie devant soi (1975). Cette propension à sortir des récits de la tradition littéraire lui vaudront souvent l’improbation de ses pairs. Aujourd’hui enfin, dans son superbe appareil critique qui complète ces deux volumes en Pléiade, Mireille Sacotte réhabilite « les innovations formelles, la modernité du style et la non-allégeance au formalisme du XIXe siècle privilégiant le romanesque », faisant de Gary l’un des plus grands écrivains de la littérature française.

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