L'Âge du Capitaine

Le quatrième roman d'Isabelle Aupy nous embarque sur un bateau en bien mauvais état, aux côtés de Maurice. Il intègre l'une des équipes qui s'efforce, tant bien que mal, de maintenir le rafiot dans un état lui permettant coûte que coûte d'avancer et, en cela, de servir les plans du Capitaine. Qui, sans vouloir se montrer impoli, est bien trop jeune pour mener cette barque ! À bord, Maurice devient Momo. Il sort de l'école, il pense tout savoir. Pourtant, ses compagnons vont lui faire comprendre qu'il ne sait rien : il ne connaît pas le fonctionnement d'une si grosse machinerie, ses cours théoriques ne lui donnent aucune clé. Premier apprentissage : observer, apprendre qui est qui et qui fait quoi. Qui va-t-on chercher quand telle pièce dysfonctionne ? Qui remplace quand les bras manquent ? Qui réconforte et soutient quand le moral s’effondre ? Voilà enfin le jeune Capitaine, celui qu'on ne voit presque jamais mais qui a la science innée de la navigation et va redresser la barre, quoi qu'il en coûte, car son honneur est en jeu et ce ne sont pas quelques vieux de la vieille qui vont lui apprendre à diriger tout ça et l’empêcher de mettre en place ses mesures : restrictions, dégraissage, non remplacement et surtout intégration de jeunes sur-diplômés de façon que personne ne soit plus responsable de rien. Avec beaucoup d'humour et des mots qui sonnent tellement juste, l'autrice s'attaque aux absurdités du monde du travail et du management jusqu'au sommet de l'État. Le culte de la performance pousse les dirigeants à ne plus considérer les humains que comme des chiffres, oubliant à quel point les relations complexes qui les unissent, les temps de discussion, de partage sont autant de piliers permettant à chacun de trouver sa place et de naviguer sur les flots tumultueux de la vie. Une analyse caustique du monde du travail.