Littérature étrangère

Stephen Greenblatt

Quattrocento

illustration
photo libraire

Chronique de Jérôme Dejean

Librairie Les Traversées (Paris)

Quattrocento de Stephen Greenblatt couronné d’un National Book Award en 2011 et du Prix Pulitzer en 2012, c’est un livre sur le Livre, la lecture et la force des mots.

Et si la Renaissance était née d’un livre ? Un vieux livre écrit au ier siècle avant Jésus Christ et que l’on pensait perdu à jamais, un ouvrage parfois évoqué par ses contemporains, un mythe, une légende, le saint Graal du bibliothécaire et du savant. Ce livre, c’est De Rerum Natura de Lucrèce, une ode à la nature et à l’amour profondément subversif, car c’est la première fois qu’est énoncée de manière empirique l’hypothèse que les choses dont se composent l’univers et les êtres sont comme ces petites particules, ces poussières qui volètent dans un rayon de soleil, les atomes constituant la matière. On imagine pourquoi ce livre est demeuré caché pendant plus d’un millénaire. En ce début de xve siècle entre en jeu un certain Poggio Bracciolini : celui qui a été le secrétaire particulier de plusieurs papes est en chasse. Copiste renommé, bibliophile, Le Pogge est avant tout un humaniste et il est sur la trace du manuscrit perdu de Lucrèce. Pour Stephen Greenblatt, la découverte de ce texte, sa copie et sa diffusion quelques années avant l’invention de l’imprimerie va profondément imprégner la pensée de l’époque, influençant des hommes tels que Machiavel, Montaigne et les plus grands penseurs et artistes de la Renaissance. Quattrocento, c’est aussi la formidable reconstitution d’une époque, entre roman et essai historique, un balancement érudit qui donne le tournis, laisse sans voix et emplit le lecteur de mots.

Les autres chroniques du libraire