Polar

Don Winslow

La Cité sous les cendres

✒ Arnaud Bresson

(Librairie Sauramps Comédie, Montpellier)

Pour clore sa trilogie Danny Ryan, Don Winslow nous offre son dernier opus qui est également son dernier ouvrage d’écrivain, l’auteur ayant décidé de se consacrer à la lutte pour la démocratie dans son pays.

Don Winslow est un des très grands écrivains contemporains de romans noirs. Sa trilogie La Griffe du chien, ayant pour sujet le trafic de drogues, a achevé de le mettre au firmament des auteurs de polar. Et l’homme, au sommet de sa gloire, accomplit un geste fort et symbolique. Il décide d’arrêter sa carrière d’écrivain pour s’employer pleinement à la défense de la démocratie qu’il sent menacée dans son pays, les États-Unis, et empêcher Donald Trump d’accéder à nouveau à la fonction suprême. On ne peut qu’en être admiratif même si le lecteur assidu de l’œuvre regrettera sans l’avouer cette décision. Pour revenir au sujet qui nous préoccupe présentement, dans La Cité sous la cendre, son dernier ouvrage, il est à nouveau question du personnage charismatique déjà présenté lors des deux premiers tomes, à plusieurs moments et dans différents lieux, le fameux Danny Ryan. Après l’avoir rencontré jeune gangster à Providence puis en cavale pour échouer à Los Angeles, nous le retrouverons ici, à l’aube de la cinquantaine, à Las Vegas. C’est un homme cassé par son passé de malfrat, qui tente toujours de se réinventer comme homme d’affaires honnête, propriétaire de casinos dans l’Amérique de Bill Clinton. Il a réussi, est devenu riche et respecté mais il en veut plus. Et l’équilibre fragile du partage des affaires avec les deux autres magnats du Nevada va voler en éclats. Et le passé, on le sait, rattrape toujours ceux qui souhaitent l’effacer. Don Winslow achève sa trilogie et donc son œuvre avec ce personnage détonnant dans l’histoire du roman noir. Danny Ryan, petit homme de main, a souhaité tout au long de cette trilogie, se racheter de ses fautes. C’est un homme droit et honnête, tant que faire se peut, dans un milieu qui ne l’est pas. Cette quête de la rédemption est magnifiquement mise en scène et rend le personnage follement attachant. Il a perdu son épouse des suites d’un cancer puis sa nouvelle compagne s’est suicidée. Mais Danny ne sombre pas dans la dépression et fait tout pour élever son fils de façon digne et convenable. Cependant, malgré la richesse des personnages présentés, ce roman est à nouveau l’occasion pour Don Winslow de pointer du doigt les travers de la société américaine, comme l’évolution de l’organisation de la capitale du jeu. Il évoque notamment comment les hommes d’affaires ont remplacé les truands à la tête des casinos et comment les méthodes se sont transformées pour passer à la légalité mais sans faire disparaître les manœuvres sauvages et les coups bas entre concurrents. Don Winslow achève son œuvre magistralement avec ce roman maîtrisé de bout en bout. Ses lecteurs devront désormais se contenter de suivre son œuvre d’homme et de citoyen.

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