Littérature française

Jean-Louis Fournier

Veuf

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photo libraire

Chronique de Jean-Marc Brunier

Librairie Le Cadran lunaire (Mâcon)

« Tout ce que les machines compliquées de la Salpêtrière n’ont pas réussi à faire, moi, je le fais avec des mots. Je te réanime. » Dans ce magnifique petit livre, Jean-Louis Fournier réanime sa femme !

Vous l’aurez compris, le nouveau livre de Jean-Louis Fournier est écrit à la mémoire de sa femme décédée. Comme il l’avait fait dans son excellent Où on va papa ?, alors adressé à ses deux enfants handicapés, Veuf se construit par petites bribes, par tranches de vie. L’auteur recourt par ailleurs à ce ton si particulier, cet humour si dérangeant pour certains, si désarmant pour d’autres, qui caractérisait déjà son précédent texte. N’oublions pas qu’il fut naguère le compagnon de rigolade de Pierre Desproges – ça laisse des traces. Le ton est donné dès la première page : « Je suis veuf, Sylvie est morte le 12 novembre. C’est bien triste. Cette année, on n’ira pas faire les soldes ensemble. » À ce prélude succède une série d’anecdotes et de souvenirs liés à leur vie commune, des réminiscences de moments partagés, moments de bonheur, mais aussi, parfois, plus malheureux… Une vie de couple, quoi ! Et puis ce ton, toujours ce ton formidable. Mais ne nous y trompons pas : les mots qui, au premier abord, nous semblent (au mieux) cyniques, cachent en vérité une infinie tendresse, un amour profond pour sa femme, pour la vie et, naturellement, pour les mots. En creux, Jean-Louis Fournier dresse également un autoportrait sans concessions, sans s’abandonner non plus à l’apitoiement. Juste quelques tranches entre rires et larmes. Ce texte est comme un exutoire : « Tous les jours, et à tout point de vue, je vais mieux, de mieux en mieux. » La force de Jean-Louis Fournier est de nous rendre extraordinairement vivante sa femme morte, Sylvie, de nous la rendre presque familière. Veuf est un hymne à la vie. « J’espère que mon livre va te plaire, écrit l’auteur. Je voudrais que ce soit un livre en couleur. J’ai l’impression de raviver nos souvenirs. » Pour le lecteur que je suis, c’est réussi, assurément ! Et avec un prodigieux talent. Chapeau bas !