Littérature française

Théodore Bourdeau

Les Petits Garçons

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photo libraire

Chronique de Delphine Chartier

Librairie Jeux de Pages (Saint-Jean-d'Angély)

Un puissant premier roman social et contemporain sur l’apprentissage de la vie, de la plus tendre et douce enfance à la plus féroce et cruelle vie d’adulte. Mais aussi un magnifique roman sur l’amitié sans faille de deux garçons issus de milieux différents, dépassant tous les obstacles de la vie.

Cette rentrée d’hiver accueille une toute nouvelle collection aux éditions Stock, inaugurée par le premier roman de Théodore Bourdeau, Les Petits Garçons. « Arpège », à l’instar de sa définition musicale, a la volonté de rassembler, sous l’étendard du romanesque, différents genres littéraires. Ces textes, portés par des voix vibrantes et singulières, expriment notre rapport au monde et souhaitent l’appréhender par une vision fictive, parfois proche du réel. Avec ce roman, Théodore Bourdeau se penche sur notre société contemporaine et ses travers. Dès les premières pages, nous faisons la connaissance de Grégoire et du narrateur, deux jeunes garçons devenus amis à l’école primaire lors d’un événement inattendu. Une forte amitié se noue et, avec elle, des jeux d’enfants candides, empreints d’une belle joie de vivre. Arrivé à l’adolescence et ses multiples questions existentielles, Grégoire se réfugie corps et âme dans les études, encouragé par ses parents qui lui promettent un bel avenir. Il renonce parfois à ses désirs personnels, les choix du cœur s’effaçant devant la tentation de la rentabilité. Le narrateur, quant à lui, est accepté dans le groupe tant convoité des lycéens. Même si leur entrée dans la vie active révèle des ambitions différentes, l’un ciblant les hautes sphères politiques, comme le souhaite sa famille, et l’autre vivotant, ne trouvant sa place nulle part, leur amitié reste intacte. Commençant par des études d’Histoire choisies par défaut (pour suivre son amie), le narrateur se tourne ensuite vers le journalisme. Après l’euphorie des premiers mois, il déchante vite et se trouve confronté à un monde faux, sournois et égoïste. L’incompréhension de ce monde qu’il avait idéalisé ainsi que ses déceptions quant à ses espoirs de vie familiale et professionnelle heureuse et épanouie, le percutent de plein fouet. Grégoire en paiera aussi les frais, bien malgré lui. L’insouciance de la jeunesse puis la témérité de l’adolescence seront à jamais englouties par la voracité de certains hommes. Dérision et modestie jalonnent ce texte poignant dans lequel l’auteur prend du recul, peut-être pour nous laisser seuls juges de cette histoire et des événements qui s’y déroulent. Au-delà d’un roman sur une indéfectible amitié, Les Petits Garçons est aussi un instantané de notre temps où la démocratie est mise à mal, où le moindre scoop, qu’il soit tragique ou indécent, fait la une des journaux et où, pire encore, monte un climat de tension et de terreur entretenu par le terrorisme.