Beaux livres

Collectif

Gregory Crewdson

photo libraire

Chronique de Serge Belfiore

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Bien sûr, la contemplation des photographies de Crewdson, au sens propre du mot, peut simplement pousser à la mélancolie, parfois au mal-être. Des banlieues middle class américaines sont le décor de vies suspendues sur un néant mis en scène ; les personnages, spectateurs stupéfaits, sont arrêtés nets dans leur élan. Les couleurs sont denses. Les références à Hopper sont bien sûr présentes, mais en y regardant de plus près, le surréalisme de Bosch n’est pas très loin. Voyager dans le monde de Crewdson est un délice un peu décadent. L’homme est présent mais n’est plus vraiment acteur. Un univers crépusculaire où des femmes attendent on ne sait quoi sur des parkings de supérettes, le coffre de la voiture grand ouvert pour recevoir un flot de courses peut-être inutiles, des pompiers surpris de leur incapacité à éteindre un incendie, des couples dans leur chambre étonnés d’en être arrivé là. Le travail de Crewdson sur la lumière est proprement merveilleux et sa mise en scène est digne du cinéma. La tristesse de ses familles révèle la vacuité de la société de consommation. Pour sortir des sentiers battus de la photographie. Mais un plaisir à ne pas mettre entre toutes les mains.

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