Jeunesse Dès 13 ans

Claire Castillon

Géographie de la peur

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Chronique de Simon Roguet

Librairie M'Lire (Laval)

Après la puissance et le choc du texte Les Longueurs, lauréat du prix Vendredi en 2022, Claire Castillon revient en littérature ado avec un texte troublant qui traite de l’agoraphobie et des troubles liés à une anxiété violente.

Maureen est une jeune fille de 19 ans qui est atteinte d’un TAG (trouble anxieux généralisé). Sa vie sociale en est complètement bouleversée. Incapable de marcher sans trop s’éloigner des murs auxquels elle peut s’appuyer si elle a un malaise, elle ne peut plus traverser une rue ou simplement se rendre dans un endroit à quelques centaines de mètres de chez elle. Ne pouvant plus rester dans une pièce sans se coller à un mur ou s’effondrer dans un fauteuil, sortir voir ses amis lui est devenu presque impossible. Celle qu’elle appelle « la squatteuse » prend de plus en plus de place et l’empêche de vivre une vie normale. Socialement, elle est en rupture avec la plupart de ses anciens amis. Seul Jérôme semble la comprendre et peut lui parler. Son psy peut la réconforter et son frère, par sa sincérité maladroite, s’inquiète pour elle. À part cela, sa vie se referme peu à peu dans son combat face au monde extérieur. Claire Castillon choisit de décrire cette pathologie et cette impossibilité à vivre par un monologue éprouvant, quoique ironique. L’humour y est même, de manière assez étrange, un des révélateurs de l’état de la jeune fille. En restant assez factuelle, elle choisit de retarder les émotions du lecteur ou, en tout cas, elle ne cherche pas du tout à faire un texte larmoyant. Il est donc d’autant plus douloureux de suivre la narratrice qui repousse violemment les siennes pour ne pas sombrer. Pour réapprendre à vivre, elle devra tenter de ne jamais se laisser envahir et dépasser par ce combat intérieur qui semble perdu d’avance. Mais est-ce vraiment la solution ? L’écriture de ce texte est encore une fois assez bluffante et très finement composée. Il aborde un sujet inédit en littérature jeunesse et nous laisse une expérience de lecture sympathique dans le pur sens étymologique du terme : « on souffre avec ».

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