Littérature étrangère

Khaled Hosseini

Ainsi résonne l’écho infini des montagnes

illustration

Chronique de Marianne Kmiecik

()

Après Les Cerfs-volants de Kaboul et Mille soleils splendides, Khaled Hosseini nous livre enfin son troisième roman, superbe et passionnant : Ainsi résonne l’écho infini des montagnes. De l’Afghanistan jusqu’aux États-Unis, en passant par Paris, il nous fait voyager à travers le temps et l’espace.

Une légende afghane raconte qu’un terrible monstre, le div, se rend parfois dans les villages et réclame un enfant à dévorer. Un jour, le div s’arrêta devant la maison de Baba Ayub, pauvre père de cinq enfants... Celui-ci savait qu’il devait sacrifier un de ses enfants s’il ne voulait pas que les cinq périssent. Après tirage au sort, c’est le plus jeune de ses fils qu’il mit à la porte. Des années plus tard, rongé par la culpabilité, il se mit en marche pour trouver la cachette du monstre. Mais c’est un jardin arboré et fleuri qu’il découvrit, des enfants y jouaient et riaient. Baba Ayub reconnu son fils adoré, heureux et bien portant. Le div laissa au père la possibilité de ramener son fils dans son village, mais si telle était sa décision, jamais plus il ne pourrait revenir sur cette colline enchantée. Après réflexion, Baba Ayub décida de laisser son fils auprès du div ; sa vie serait sans aucun doute meilleure que celle qu’il aurait pu lui offrir. Ce conte, c’est celui qu’un père raconte à son fils, Abdullah, et à sa fille, Pari, alors qu’il les emmène en voyage. Le garçon d’une dizaine d’années voue à sa jeune sœur un amour incommensurable ; un lien d’une force incroyable les unit. Pourtant, ce lien ne peut rien contre les événements qui sont sur le point de survenir et de bouleverser leurs vies à jamais, ainsi que celles de nombreux autres personnages. Celle de Saboor, père des deux enfants, et de Parwana, sa seconde épouse, dont le cœur et la conscience sont lourds de ses pêchés passés. Celle de l’Oncle Nabi, chauffeur d’un riche rentier de Kaboul, secrètement amoureux de la jeune femme de son employeur. Celle de Monsieur Wadhati, un riche homme solitaire, féru de peinture. Celle de sa femme aussi, Nila, rebelle et passionnée, poétesse de talent qui n’a pas sa place dans un pays où les femmes ne sont pas libres de s’exprimer et à peine libres de vivre. Celle de Markos, chirurgien bénévole grec à Kaboul, qui a vu son enfance et sa vie chamboulées par l’arrivée d’une adolescente bien particulière. Ou encore celle d’Adel, le jeune garçon qui découvre que son père n’est pas tout à fait le héros qu’il avait imaginé. Toutes ces histoires sont liées, des années 1950 jusqu’à nos jours, de l’Afghanistan jusqu’à Paris, en passant par la Grèce et les USA, les destins de ces personnages se croisent, se mêlent, se démêlent dans une orchestration sublime qui met en avant la beauté, la fragilité, les doutes et les erreurs de chacun. Des récits poignants qui évoquent la famille, les liens fraternels, le poids du passé, de l’exil, de l’héritage ou des traditions. C’est aussi le portrait d’un pays magnifique, mais ravagé par les guerres, instable, un pays inégalitaire qui profite aux criminels et où la place des femmes est sans cesse réduite. Ce roman chamboule, il secoue le lecteur grâce à la complexité de ses personnages et à son intrigue fascinante. La plume de l’auteur, délicate et percutante, ébranle tous les préjugés. Un roman dont on sort grandi.

Les autres chroniques du libraire