Littérature étrangère

Bernardo Atxaga

Séjour au Nevada

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photo libraire

Chronique de Vincent Ladoucette

Librairie Privat (Toulouse)

Des dix mois passés avec sa femme et ses deux filles dans le Nevada, l'écrivain basque a tiré un livre singulier, intime et poétique, d'une force d'évocation exceptionnelle.

Les descriptions des paysages désertiques et des casinos de Reno succèdent aux observations de Bernardo Atxaga sur la société américaine, dont l'actualité est essentiellement marquée par la guerre en Irak et par la campagne présidentielle de Barack Obama, porteur d'un immense espoir pour une grande partie du pays. Les nombreuses conversations auxquelles il se livre avec ses amis, remplies de références à la littérature et à la poésie, ainsi que ses excursions et sa lecture de plusieurs récits indiens, témoignent de son insatiable curiosité culturelle. L'auteur explore ce territoire hostile, où le danger s'incarne aussi bien dans les serpents à sonnettes et les veuves noires, que dans le prédateur sexuel qui échappe à la police en répandant un climat de peur et de suspicion dans les environs du campus. Mais le Nevada, terre d'accueil des émigrés basques depuis plus d'un siècle, suscite également chez Bernardo Atxaga un fort sentiment de proximité, qui lui rappelle constamment le pays dans lequel il a grandi. En accordant les pleins pouvoirs à son esprit vagabond, il assemble dans ce livre à la surprenante forme hybride, des extraits de son journal de voyage, des messages à un ami, des rêves, des images d'enfance, des réminiscences de son père à l'hôpital et des séquences qui s'apparentent à de courtes fictions et fantaisies, élaborées à partir de ses propres souvenirs ou d'après les histoires racontées par des tiers. Malgré la gravité de certains passages, malgré la douleur sourde causée par la mort omniprésente, Séjour au Nevada est une œuvre imprégnée d'humour, manifestation du puissant désir de vivre qui semble habiter Bernardo Atxaga. Puisque, comme le dit celui-ci : « Nous retournons toujours à la vie quotidienne car il n'est pas d'autre place pour nous »