Littérature française

Jean-Yves Cendrey

Mélancolie vandale

photo libraire

Chronique de Géraldine Violet

Pigiste ()

Rien ne va plus chez Kornélia Sumpf. La cinquantenaire traverse une mauvaise passe : amour, travail, famille, tout va à vau-l’eau. Virée berlinoise mélancolique et iconoclaste.

Berlin 2010. Kornélia, 53 ans, quitte la prison de Moabit où elle est interprète et découvre qu’on lui a piqué son vélo. Sur le chemin du retour qui l’oblige à traverser à pied l’immense ville d’Ouest en Est, elle revient, rageuse, aigre et désabusée, sur son présent, sur son passé. Mariée à Ali qu’elle ne désire plus, un germano-turc qui vit à ses crochets, mère adoptive d’une adolescente qui la rejette, elle ressasse, mélange tout, et dresse un portrait gratiné des siens. Dans le théâtre invisible de Kornélia se superposent les tableaux d’hier et d’aujourd’hui, l’enfance passée en RDA et l’Allemagne nouvelle, pleine de contradictions. Et on y croise une mère qui n’hésita pas à dénoncer sa propre sœur de ses velléités de passage à l’Ouest, un « Petit-Papa » ancien membre de la Stasi qui brûle encore aujourd’hui ses archives au fond de son jardin, une tante nymphomane mais attachante coincée à l’Est quand le mari a pu filer de l’autre côté, un oncle libidineux et pervers, et une belle-mère loufoque, écrivain turque ruinée. Chacun en prend pour son grade, les morts comme les vivants dans un incendie mental où Berlin flamboie avec son passé poisseux, son présent drolatique et son avenir incertain.

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