Littérature étrangère

Evan S. Connell

Mrs. Bridge

illustration
photo libraire

Chronique de Camille Racine

Maison d'édition PKJ (Paris)

Chefs-d’œuvre de la littérature américaine d’après-guerre, Mrs Bridge et Mr Bridge illustrent la répartition conventionnelle des genres au sein de la vie maritale dans la société américaine des années 1930. Un livre culte adapté au cinéma en 1990 avec Paul Newman et Joanne Woodward.

Evan S. Connell (1924-2013) connaît un immense succès avec la publication de Mrs. Bridge en 1959. Il y érige au rang d’héroïne une femme au foyer ordinaire. Ironie, anecdotes savoureuses, tout y est. Dix ans plus tard, il publie Mr. Bridge, le second volet de ce diptyque. Chaque volume présente en une centaine de brefs épisodes l’histoire de Walter et India Bridge, une famille américaine de la classe moyenne dans l’entre-deux-guerres, à Kansas City. Lui est avocat, elle est mère au foyer. Lui ne se soucie pas de ce qui se passe à la maison pendant la journée, et elle n’a pas plus de raisons de s’inquiéter de sa vie professionnelle. Néanmoins, ni l’un ni l’autre ne cessent ce jeu. Les années passent, ils ont trois enfants et ils s’habituent à leur vie conjugale. India est une épouse parfaite et une mère dévouée. Son quotidien est réglé comme du papier à musique. Quand elle reçoit, India sonne la cloche pour appeler sa bonne, persuadée que c’est ce qu’on attend d’elle. India fait du mieux qu’elle peut et en toute circonstance. Elle guette les regards approbateurs et pense avoir échoué dans son rôle de mère, lorsqu’elle découvre un magazine porno dans les affaires de son fils. Le quotidien de la famille Bridge semble inébranlable.

La crise financière et l’invasion de la Pologne en 1939 ne sont qu’esquissées dans le récit, car ils contraignent le couple Bridge à écourter leur voyage en Europe. Insouciants ? Non, India et Walter sont plutôt des êtres immuables. Leur rêve américain s’est réalisé et, en même temps, il sonne faux. Parus dans la collection « Belfond Vintage », ces deux romans se dégustent avec délice parce qu’ils sont tout simplement intemporels. Des classiques tombés dans l’oubli, à revisiter sans modération.