Au regard des actualités, le sujet de la liberté d’expression mérite encore d’être creusé. L’expérience du journaliste australien Peter Greste, relatée dans Voyage d’un reporter au pays de la censure, illustre la pression subie par les journalistes. Arrêté en 2013 alors qu’il couvrait la chute du gouvernement égyptien de Morsi, le journaliste a été victime d’un procès-spectacle. Témoignage classique sur son arrestation, son emprisonnement et son procès, l’ouvrage offre également une réflexion sur l’évolution du journalisme-spectacle et la réalpolitique. On comprend les menaces pour la liberté de la presse quand on voit la place que prend l’influence politique dans le journalisme. Même dans la plus policée des démocraties, les journalistes qui s’attachent à défendre la vérité et l’objectivité font l’objet de pressions. Différemment, La Bave du crapaud est un ouvrage ambitieux qui distingue dans la liberté d’expression, la censure et le politiquement correct. Publié dans la nouvelle collection philosophique « La Relève » l’essai de Denis Ramond aborde ce débat avec des bases philosophiques, théoriques et sociologiques, tout en resituant les repères historiques. En portant la réflexion jusqu’à l’inévitable dilemme des limites de la liberté d’expression, l’auteur propose des critères de délimitation intéressants qui mériteront d’être repris. Au final, Denis Ramond veut sortir la liberté d’expression de son usage et de son interprétation conservatrice et cela lui réussit bien. Son traité nous invite à réfléchir, en offrant aux lecteurs des clés de compréhension du système de pouvoirs et à prendre du recul face à une « défense émotive, identitaire et autoritaire de la liberté d’expression ». Complémentaires, ces deux ouvrages sont des hymnes à la tolérance et à l’hétérodoxie.